2011
Published in / Publié dans Revue & Corrigée, n° 88, June / juin 2011.
2011
Published in / Publié dans Revue & Corrigée, n° 88, June / juin 2011.
2011
Déserts by Edgard Varèse was first performed at the Théâtre des Champs-Élysées in Paris, on December 2, 1954. This concert has gone down in history as one of the greatest scandals in XXth century avant-garde music, as the audience rioted during the performance. Socio-historical context surely played a role, as France was still under the Fourth Republic, marked by its policy of “cultural democratization”. This concert was part of the National Orchestra’s “Tuesdays” (in fact, as it was to be broadcast live, it took place exceptionally on a Thursday), which were free and as a result attracted a wide audience not necessarily used to musical experimentation such as this. The concert was conducted by Hermann Scherchen, assisted for the occasion by Pierre Henry, who was in charge of the electro-acoustic device. It presented pieces from the classical repertoire – Mozart’sGrand Overture in B flat and Tchaikovsky’s Symphony No. 6 (“Pathétique”) – and a work that confronted acoustic and “organized” sounds in an innovative way.
During the performance, people reacted noisily, and at the same time, another “music” emerged in counterpoint, improvised, developing in a more or less undecided – if not indeterminate – way, and at irregular intervals. Listening to the recording, the protests literally compete with Varèse’s music, developing a new and particularly complex musical form, a succession and intertwining of murmurs, muted mutterings, and sudden and untimely waves of boisterous disapproval. But behind the rejection, one can maybe also discover, in this other music, the intrinsic link between noise and democracy.
This disc presents this other sonic manifestation, the one performed by the audience. In a certain way, I have followed the logic of retrenchment that underpins Varèse’s initial work. Edgard Varèse’s Déserts is a mixed composition, structured in four instrumental movements, to which three electronic interpolations are added, which interrupt the instrumental development. During these interpolations, the orchestral sound fades away to give way to the recorded sounds. In (Déserts), I have simply extended this process, erasing Varèse’s piece to let a new type of recorded “interpolation” appear: the anonymous noise of the audience.
Recorded on December 2, 1954, in Paris. Edited on April 4, 2009, in Paris.
Déserts d’Egard Varèse fut créé au Théâtre des Champs-Elysées à Paris, le 2 décembre 1954. Ce concert est resté dans les mémoires comme l’un des grands scandales de l’histoire de la musique avant-garde du XXe siècle, donnant lieu à une véritable révolte de la part du public. Le contexte sociohistorique n’y fut sans doute pas étranger. L’époque était alors celle en France de la Quatrième République, marquée du point de vue de la culture par la politique dite de « démocratisation culturelle » : le concert était gratuit, dirigé par un célèbre chef d’orchestre, Hermann Scherchen – accompagné pour l’occasion par Pierre Henry au pupitre des commandes électro-acoustiques – et s’inscrivait dans la programmation des « mardis » du National (se déroulant exceptionnellement un jeudi pour les besoins de la retransmission en direct). Il tentait en outre d’articuler des pièces issues du répertoire classique (en l’occurrence la Grande ouverture en si bémol de Mozart et la Symphonie Pathétique de Tchaïkovski) et une œuvre novatrice dans sa confrontation de sons acoustiques et de « sons organisés ». En raison de leur gratuité et de leur cadre, ces concerts accueillaient généralement un public nombreux, non nécessairement coutumier des expérimentations musicales.
Lors de cette interprétation, le public réagit bruyamment à la musique, mais dans le même temps une autre « musique », improvisée celle-ci, émergeait en contrepoint, se développant de manière plus ou moins indécise, sinon indéterminée, et à intervalles irréguliers. A l’écoute de l’enregistrement, les protestations du public rivalisent littéralement avec la musique de Varèse, dessinant, dans leur propre effectivité, une autre forme musicale, particulièrement complexe, où se succèdent et s’entremêlent des heurts violents, des murmures et une rumeur sourde, de brusques surgissements intempestifs et des vagues houleuses de désapprobation. Mais peut-être qu’en deçà du désaveu, pointe également dans cette autre musique le lien intrinsèque qui existe entre bruit et démocratie.
C’est cette autre manifestation sonore, performée par le public, que ce disque se propose de donner à l’écoute. Pour cela, j’ai en quelque sorte poursuivi la logique de retranchement qui sous-tend la pièce initiale de Varèse. Déserts est une œuvre mixte, qui est structurée en 4 mouvements instrumentaux, auxquels s’ajoutent 3 interpolations électroniques qui viennent interrompre le développement instrumental. Durant ces interpolations, les sons de l’orchestre s’effacent pour laisser place aux sons enregistrés. Dans (Déserts), j’ai simplement continué cet effacement, éclipsant la pièce de Varèse pour laisser apparaître un autre type d’« interpolations » enregistrées : le bruit anonyme du public.
Enregistré le 2 décembre 1954, Paris. Edité le 4 avril 2009, Paris. Durée : 27’10’’
2011
Recording of a microphone capturing its own destruction by fire.
Record and booklet, 5′. Editions Provisoires
Enregistrement d’un microphone captant sa propre destruction par le feu.
Disque et livret, 5 min. Editions Provisoires
2011
CAC 40 Brétigny is permanently audible during the art centre’s opening hours. The device is a computer program connected to the Internet that transposes, in concordance with the opening times of the Paris Stock Exchange, the real-time CAC 40 index rates in audio frequencies, as well as its 50-day moving average.
The software, installed on one of the computers in the art centre’s office, plays the generated sounds in the corridor situated behind the exhibition space. The program is configured as a background task, automatically launched as soon as the computer is powered on, according to the working days and hours of the centre’s team.
With this work Matthieu Saladin suggests a peculiar listening session in rhythm with the market variations and subject to opening hours in step with the stock exchange, and not with the ones of the cultural venue. One of the questions the work probably raises is, for how much longer?
Le dispositif central de « CAC 40 Brétigny » est un programme informatique qui, connecté à internet, transpose en temps réel et selon les heures d’ouverture de la bourse de Paris le taux du CAC 40, ainsi que sa moyenne mobile sur 50 jours (MA 50) en fréquences sonores. La transposition s’effectue par simple substitution de l’unité de mesure. Les fréquences évoluent, se rapprochent ou s’éloignent l’une de l’autre au gré des oscillations du marché et engendrent ainsi dans leur mouvement des phénomènes acoustiques. Le programme, installé sur l’un des ordinateurs du bureau du centre d’art, est configuré en tâche de fond, de telle sorte qu’il se mette en fonction automatiquement dès que l’ordinateur est allumé, selon les heures de travail de l’équipe du CAC Brétigny.
Production CAC Brétigny, installation sonore permanente. Projet Phalanstère.
2011
A secret history of crises
This project is presented in the form of a programming cycle that aims to put history’s major capitalist economic crises into the perspective of creations that are contemporaneous to them.
Initial extracts were presented on 19 February 2011 at the CAC Brétigny arts centre, with a programme including the piece Adnos I (1973-74) by Eliane Radigue, Jean Dréville’s documentary Autour de l’argent (1929) and the piece CAC Brétigny 1988-2011.
Une histoire secrète des crises se présente sous la forme d’un cycle de programmation qui tente de mettre en perspective des crises importantes de l’histoire de l’économie capitaliste avec des créations qui leur sont contemporaines.
Des premiers extraits ont été présentés le 19 février 2011 au CAC Brétigny, avec comme programmation la pièce “Adnos I” (1973-74) d’Eliane Radigue, le documentaire “Autour de l’argent” (1929) de Jean Dréville et la pièce « CAC Brétigny 1988-2011 ».
2011
Whirl
A ten-second video sequence transferred onto DVD and played in a loop, in one direction and then in the other, reproducing the series of shots created by Marcel L’Herbier for his film L’argent (1928) in which a camera plunges down from the top of the cupola of the Bourse de Paris (Paris stock exchange) in a spiral and onto the trading floor.
Séquence vidéo de 10 secondes transférée sur DVD et jouée en boucle, dans un sens puis dans l’autre, qui reprend le dispositif de prises de vues imaginé par Marcel L’Herbier, pour son film “L’argent“ (1928), où une caméra plonge en tournoyant du haut de la coupole de la bourse de Paris jusqu’au parterre des boursicoteurs.
2010
Set of three CDs produced by Arika and given to the public during the 2010 edition of the Instal festival (Glasgow). Each disc gives to listen to the mechanism of a CD player, respectively when it does not recognize the disc (40 sec), when the disc is read normally (60 min) and when the disc is ejected (8 sec).
Ensemble de trois CDs produits par Arika et distribués au public lors de l’édition 2010 du festival Instal (Glasgow). Chaque disque donne à entendre le mécanisme d’un lecteur CD, respectivement lorsqu’il ne reconnaît pas le disque (40 sec), lorsque le disque est lu normalement (60 min) et lorsque le disque est ejecté (8 sec).
Production Arika/Instal, Glasgow
2010
Sound installation. An empty room is equipped with a set of presence sensors fixed to the walls. Speakers play sound at very high volume. The sound is cut automatically as soon as the sensors detect any movement in the room. Instal 2010, Glasgow.
Installation sonore. Une pièce vide est munie d’un ensemble de capteurs de présence fixés aux murs. Des enceintes diffusent du bruit à un très haut volume sonore. Le bruit se coupe automatiquement dès que les capteurs repèrent un mouvement dans la pièce. Instal 2010, Glasgow.
2010
Project realized with Mattin, taking the form of a reflexion on the democracy through a documentary on the revolts of concert to which are associated performed actions.
“[…] The authority whose duty it was to know these regulations, and, when known, to apply them in its judgments and to penalize the disobedient, was not a pipe nor, as now, the mob’s unmusical shoutings, nor yet the clappings which mark applause: in place of this, it was a rule made by those in control of education that they themselves should listen throughout in silence, while the children and their ushers and the general crowd were kept in order by the discipline of the rod. In the matter of music the populace willingly submitted to orderly control and abstained from outrageously judging by clamor; but later on, with the progress of time, there arose as leaders of unmusical illegality poets who, though by nature poetical, were ignorant of what was just and lawful in music; […] they unwittingly bore false witness against music, as a thing without any standard of correctness, of which the best criterion is the pleasure of the auditor, be he a good man or a bad. By compositions of such a character, set to similar words, they bred in the populace a spirit of lawlessness in regard to music, and the effrontery of supposing themselves capable of passing judgment on it. Hence the theater-goers became noisy instead of silent, as though they knew the difference between good and bad music, and in place of an aristocracy in music there sprang up a kind of base theatrocracy. For if in music, and music only, there had arisen a democracy of free men, such a result would not have been so very alarming; but as it was, the universal conceit of universal wisdom and the contempt for law originated in the music, and on the heels of these came liberty. […] Next after this form of liberty would come that which refuses to be subject to the rulers; and, following on that, the shirking of submission to one’s parents and elders and their admonitions; then, as the penultimate stage, comes the effort to disregard the laws […]” Platon, Laws
Projet réalisé avec Mattin, prenant la forme d’une réfexion sur la démocratie à travers un documentaire sur les révoltes de concert auquel s’associent des actions performées.
« À l’époque, […] il revenait à des hommes qui s’occupaient d’éducation d’écouter l’exécution de ces pièces en silence jusqu’à la fin, tandis que les enfants, leurs pédagogues et la masse du public étaient ramenés à l’ordre par le bâton du service d’ordre. Voilà donc suivant quel type d’ordonnance la masse des citoyens acceptait d’être contrôlée en ces matières sans avoir l’audace de faire du tapage pour exprimer son jugement. Par la suite cependant, à mesure que le temps avançait, apparurent des compositeurs qui commencèrent à violer les règles dans le domaine des Muses […] ils répandirent sur le compte de la musique ce mensonge suivant lequel en musique il n’y avait aucune place pour une quelconque rectitude et que c’est le plaisir de celui qui y trouve sa jouissance, que celui-ci fût meilleur ou pire, qui décidait avec le plus de rectitude. À force de composer de telles œuvres, et d’y ajouter des paroles de ce genre, ils inculquèrent au grand nombre la désobéissance aux règles dans le domaine des Muses, et l’audace de se croire des juges compétents. La conséquence fut que le public du théâtre qui jadis ne s’exprimait pas se mit à s’exprimer, comme s’il s’entendait à discerner dans le domaine des Muses le beau du laid ; et à une aristocratie dans le domaine des Muses se substitua une “théâtrocratie” dépravée. Et si encore c’eût été une démocratie limitée à la musique et composée d’hommes pourvus d’une culture libérale, ce qui est arrivé n’eût en rien été aussi terrible. Mais ce qui à ce moment-là commença à s’installer chez nous à partir du domaine des Muses, ce fut l’opinion que tout homme s’entendait à tout et qu’il pouvait se mettre en infraction ; et la licence suivit. […] Tout de suite après cette liberté en vient, selon toute vraisemblance, une autre, celle qui refuse d’être l’esclave de ceux qui représentent l’autorité, puis une autre encore, celle qui refuse d’être l’esclave d’un père, d’une mère et des gens plus âgés et d’accepter leurs remontrances. Lorsque l’on approche de la fin du parcours, on cherche à ne pas obéir aux lois […] » Platon, Les Lois.
Production CAC Brétigny